FACE AUX MULTINATIONALES ET À L'EUROPE : QUE PEUVENT VRAIMENT DIOMAYE FAYE ET SONKO ?
Extrait de "Décrypter l'Afrique Le Panel"
Le nouveau pouvoir sénégalais parviendra-t-il à incarner une voie pacifique de renégociation des relations inégales entre l’Occident et les pays africains ? Saura-t-il incarner un souverainisme démocratique ? Aura-t-il vraiment la marge de manœuvre pour appliquer son panafricanisme de gauche, un programme qui se veut foncièrement redistributeur ? Le lundi 22 avril, Bassirou Diomaye Faye recevait le président du Conseil européen Charles Michel et évoquait le délicat problème des accords de pêche entre son pays et l’Union européenne. Autre dossier chaud : celui de la renégociation des contrats pétroliers et gaziers. Que peut faire une démocratie africaine face à la voracité des multinationales ? On en parlera. On évoquera aussi, rapidement, les enjeux institutionnels et peut-être constitutionnels du pays de la Téranga, gouverné par un tandem dans une formule assez originale et très scrutée.
Présentation : Théophile Kouamouo. Panélistes : Fabrice Wuimo (journaliste), Frank Toti (journaliste), Geneviève Goëtzinger(ancienne journaliste, communicante) Laurent Bigot (ancien diplomate, consultant).
S’agissant des Accords de Pêche avec l’Union européenne, il est intéressant de noter l’illusion d’optique que représente la renégociation des Accords de Pêche avec l’Union européenne qui es brandie comme un « scalp », à s’offrir. Illusion d’optique pour plusieurs raisons, notamment (i) parce que les Accords de Pêche ont des protocoles renégociés tous les 6 ans, dans des commissions mixtes, (ii) parce que ces Accords sont publics, et publiés, que les comptes rendus des commissions mixtes le sont aussi, et enfin (iii) parce qu’il n’y a RIEN à renégocier avec d’autres types d’opérateurs puisqu’il n’y a pas d’Accords. En d’autres termes, si l’ont peut mettre en scène un bras de fer avec l’Union européenne, c’est bien parce qu’elle le permet – institutionnellement parlant puisque les Accords sont publics et passent par le Parlement européenne ainsi que le Conseil – et qu’elle l’accepte (en vertu de l’exigence de transparence qu’elle s’impose sur ces sujets). Et enfin, il importe de noter que les navires européens ne représentent pas la majorité (et de loin) de ceux qui opèrent dans les eaux Sénégalaises (et plus généralement du Golfe de Guinée). Mais étonnamment, ou pas, jamais n’est mis en scène la renégociation des Accords de Pêche avec la Chine populaire, la Corée, Taïwan, le Japon voire même la Russie. Qui est fou ? Comme on dit à Abidjan ;)
En conclusion, il s’agit d’une action extrêmement symbolique, dans laquelle l’Union européenne est certainement un allié objectif, même si probablement à son corps défendant…Même si elle aurait un intérêt à ce que ce mouvement de mise en lumière de ce qui se passe dans les mers aille jusqu’à interroger les pratiques de l’ensemble des flottes. Et in fine, une vraie révolution serait l’annulation de toutes les licences de Pêche données en dehors d’Accord de Pêche formels, discutés institutionnellement, et soumis à la redevabilité vis-à-vis des citoyens (au moyen de l’Accord du Parlement et de la publication de ces Accords).